Leurs récits, partagés entre une envie de partir et la nostalgie qui tenaille d’être loin des siens, donnent une dimension très profonde au film ». Ce film, dont parle l’avocate et photographe belge Carine Doutrelepont, l’une des quatre organisatrices du festival de cinéma qui s’installe pour deux jours à Bruxelles, c’est le documentaire de la réalisatrice belge Yasmine Kassari, Quand les hommes pleurent. Il raconte comment, à la fin des années 90, 30.000 Marocains traversent le détroit de Gibraltar pour entrer clandestinement en Espagne. 14.000 sont interceptés et renvoyés dans leur pays. 1.000 meurent noyés et 15.000 réussissent à passer. Au-delà des chiffres, ce sont ces hommes, que la réalisatrice a choisi d’interroger avec sa caméra, ceux qui croient encore à un eldorado occidental et n’hésitent pas à se jeter littéralement à l’eau pour l’atteindre.
« Yasmine Kassari - dont un second film, L’enfant endormi, est également au programme du Vendôme, NDLR - y aborde le ressenti de la double identité que l’on peut percevoir quand on est immigré, poursuit Carine Doutrelepont. Clandestins et rejetés par la société espagnole d’un côté, et plus tout à fait Marocains de l’autre ». C’est précisément ce que la cofondatrice de l’ASBL bruxelloise Médiasonge, créée en mars 2022, a voulu instiller dans ce mini-festival. « En fondant cette ASBL, j’ai voulu relier les humains à travers l’art aux valeurs portées par les droits humains, reprend l’avocate. Ces valeurs sont, pour moi, les seules qui ont un sens dans nos sociétés. Je suis avocate et photographe et c’est le même engagement qui me porte d’un côté comme de l’autre, dans la défense des libertés dont la liberté d’expression, de la protection de la nature et de l’acceptation de la différence ».
L’immigration marocaine, à l’envers
Côté programmation, les films s’engagent dans la question de l’immigration et, un peu de la condition des femmes. « J’ai voulu raconter une histoire entre des gens simples, de petites gens, sur fond de la grande histoire », raconte Mohamed Amin Benamraoui, le réalisateur d’Adiós Carmen. Où nous sommes au temps du franquisme en Espagne et de la marche verte au Maroc pour libérer le Sahara occidental de l’occupation espagnole. Où une rencontre merveilleuse naît entre Amar, 10 ans, et Carmen, Espagnole exilée au Maroc qui lui fait découvrir le cinéma de Bollywood. Un film en partie autobiographique, « une histoire d’amitié mais surtout celle de l’immigration marocaine en Belgique, à l’envers d’une certaine façon, c’est-à-dire à travers les yeux d’un enfant resté au Maroc en attendant le retour de sa mère », confie le réalisateur. Le goût de l’autre, ce sont trois films au prix réduit de 8 euros à voir au cinéma Vendôme à Bruxelles. Versions originales en arabe, berbère et espagnol sous-titrés français. La projection est suivie d’un échange avec la réalisatrice ou le réalisateur. Infos et réservations sur www.mediasonge.be/ (http://www.mediasonge.be/)
Article rédigé par
Le Soir